Planète-Environnement #05. Stéphanie Regni a fait de son engagement son moteur professionnel. Il y a 9 mois, elle a lancé un nouveau concept de distribution en ligne de produits cosmétiques et d’entretien pour la maison. Son idée ? Réduire les déchets en plastique liés aux emballages. Comment ? En proposant toute une sélection de produits naturels dans des packagings respectueux de l’environnement : compostables ou réutilisables. Et c’est là que son modèle se différencie ! Les contenants en verre qu’elle choisit, pour de la lessive, des crèmes ou des déodorants par exemple, sont rechargeables. Inutile de tout racheter à nouveau. Ni même de vous rendre en magasin ! Stéphanie livre directement chez vous les recharges et repart avec vos bocaux vides. Une sorte de consigne ambulante !

C’est malin, économique et efficace ! Depuis le lancement de son business, elle a ainsi évité la consommation de 100 kilos de plastique, l’équivalent de 10 000 petites bouteilles d’eau ! Elle partage aussi son expertise lors d’ateliers, dans des écoles, des associations, des entreprises ou pour des groupes à domicile. Le thème de ses workshops : comment viser le zéro déchet et lutter contre le plastique jetable. Sa détermination à œuvrer pour la planète, sa volonté d’éclairer les consciences, son humilité et son enthousiasme inspirent. Et si on la suivait pour tendre, nous aussi, la main à la planète ?

Pourquoi avoir lancé un projet en faveur de l’environnement ?
J’ai toujours été sensible à cette thématique. Ingénieure en génie des procédés, j’ai travaillé 10 ans en France dans l’industrie de l’énergie, à étudier notamment l’impact environnemental de ce secteur. Et avant mon départ en Californie, j’ai passé 3 ans à développer des projets biogaz, une énergie renouvelable générée à partir de déchets. C’est à ce moment-là que j’ai réalisé combien les déchets organiques sont une ressource précieuse.

Qu’a changé la Californie dans ce parcours ?
Je suis arrivée à San Francisco, une ville référence, à la pointe du zéro déchet, il y a 3 ans. Vivre ici m’a encouragée à m’engager encore plus. Puis à lancer mon business et ça fait maintenant deux ans que je réduis mes déchets personnels ! J’en suis fière mais j’avais envie de faire profiter les autres de mon expérience. Pour que l’impact soit plus important. Pour faire comprendre que chacun fait des choix qui ont des conséquences. Et que l’on a tous le pouvoir de faire les bons !

Quel est le but visé par ce que tu entreprends ?
Tout simplement de prendre soin de notre environnement ! Parce qu’il n’y a pas la planète d’un côté et les humains de l’autre ! Ils sont liés. C’est un tout. Si la planète est polluée, c’est nous qui en payons les frais et c’est donc essentiel de la protéger. La vie humaine en dépend. On ne devrait d’ailleurs même pas se poser la question. C’est une démarche qui devrait être innée, intégrée dans nos vies, nos réflexes et nos habitudes.

Comment réussir à faire passer ce message ?
Mon rôle aujourd’hui, c’est de montrer qu’il suffit parfois de choses toutes simples pour y arriver. Que c’est valable et utile. C’est pour ça que j’ai lancé Fillgood, pour offrir des possibilités et faciliter la logistique de ceux qui n’ont pas le temps de ramener leurs bouteilles en consignes ! Je me sens investie d’une mission et j’essaie d’informer et d’aider les gens à consommer de manière plus éco-responsable. En commençant par éviter le plastique !

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Quel est le souci avec le plastique ?
C’est un matériau qui a été développé pour ses propriétés d’adaptabilité et de durabilité. Sauf que 50% du plastique consommé est jetable. Du coup, il se retrouve dans l’environnement pendant plusieurs centaines d’années et il pollue. Dans l’océan par exemple, il se fragmente en micro-plastiques qui absorbent tout un tas de polluants et terminent dans l’estomac des poissons. C’est comme ça qu’ils intègrent la chaîne alimentaire… jusqu’à nous ! C’est une réelle menace pour notre santé.

Et le recyclage ne permet pas de limiter le problème ?
Non, le recyclage n’est pas une solution durable parce qu’un objet en plastique n’est pas recyclable à l’infini, comme le verre ou le métal. Et il y en a tellement, que personne n’en veut ! De nombreux pays envoient leurs déchets en Asie, ce qui est une source de pollution énorme pour ces régions. D’ailleurs, la Chine a décidé de fortement limiter ses importations de déchets. Il va donc bien falloir ouvrir les yeux, assumer et trouver des solutions chez nous.

Quelles solutions justement pour éviter le plastique à notre niveau ?
Plein ! Comme privilégier les couverts réutilisables, les gourdes, les sacs en tissus, les savons, les contenants en verre ou les vêtements en matières naturelles (coton, soie ou lin). Car même dans les vêtements synthétiques, il y a du plastique : des micro-fibres qui partent dans l’eau des machines à laver et terminent… dans l’océan ! En fait, plus on commence à réfléchir au sujet, plus on se rend compte qu’il faut repenser sa consommation !

Une tâche qui semble difficile…
La difficulté, c’est que cette démarche va à l’encontre du fonctionnement du monde actuel et des modèles que l’on connaît. Il faut se donner le temps de découvrir et adopter des alternatives qui existent déjà. Et chaque étape, chaque petit succès est source de satisfaction ! Pour soi, pour les autres et pour la planète !

Ces possibilités, tu les développes lors des ateliers que tu animes ?
Il y a un véritable intérêt pour le sujet mais les gens ne savent pas forcément quoi faire chez eux. Du coup, oui, je donne des clés pour réussir à réduire ses déchets et lutter contre le plastique jetable au quotidien. Avec des exemples concrets et un programme en 6 « R » développé par la communauté du zéro déchet : Remember (se souvenir), Refuse (Refuser), Reduce (réduire), Reuse (réutiliser), Rot (composter) et Recycle (recycler).

Ce programme en R, c’est quoi exactement ?
Ces 6 verbes endossent un rôle de guide pour se rappeler les comportements eco-friendly. Sachant qu’ils sont classés par ordre d’importance ! Le Remember permet ainsi de se rappeler pourquoi on fait ça, pourquoi c’est important pour soi et donc de garder la motivation. Le Recycle arrive à la fin car recycler des déchets n’est pas une solution optimale. Et, l’autre pilier de la réussite, c’est le Refuse, parce qu’il faut apprendre à refuser pour diminuer sa consommation de plastique !

Refuser quoi par exemple ?
Une paille dans un cocktail, un sachet de mayonnaise ou de ketchup dans un fast-food, des sacs en plastique… Refuser tout ce qui va finir dans la poubelle après un usage unique et qui n’a pas d’intérêt majeur. Ce choix est essentiel et les gestes deviennent peu à peu automatiques ! À nous de le décider !

Crédit photo : Eugénie Le Moulec. Atelier, boutique Les Lunes, marque de vêtements à base de bambou (San Francisco)

Une astuce pour aider à se lancer ?
Commencer par ce qui paraît le plus facile ! Moi, c’était d’avoir des couverts en bambou dans mon sac. Pour d’autres, ce sera des poches en tissu, une gourde, faire ses courses en vrac ou utiliser des shampoings en barre.

Tu appliques tout ça dans ta vie ?
Bien sûr ! Nous sommes une famille de 4 et j’ai un mari compréhensif… On trie de manière méticuleuse, on composte, on réutilise, je vais au centre de tri local et j’ai changé ma consommation en profondeur. Résultat : nous générons moins d’un kilo par mois de déchets et c’est en progression constante !

Mais ça ne prend pas trop de temps ?
Non, c’est surtout une question d’entraînement et d’attention ! Comme je suis vigilante quand j’achète, mon tri est plus facile. Je gagne même du temps en faisant mes courses. Et maintenant, je vis comme ça ! Même quand je me balade, je ramasse ce que je trouve ! Tout comme je fais régulièrement du beach cleanup (nettoyage des plages) sans que ce soit un effort.

Quelles sont les prochaines étapes de ta démarche ?
Développer ces idées et toucher toujours plus de monde ! Car l’union fait la force ! Je travaille d’ailleurs sur un guide, en cours de réflexion. L’objectif : accompagner tous ceux qui ont envie de se lancer mais ne savent pas comment. Leur fournir un mode d’emploi pratique avec des solutions faciles pour supprimer le plastique de nos vies !

À suivre donc !
Merci pour ces précieux conseils. Et merci à Eugénie Le Moulec pour ses photos. 


Pour aller plus loin :

  • Fillgood pour une sélection de produits et ustensiles éco-responsables (livraisons dans la Baie de San Francisco).
  • L’actualité des ateliers sur la page Facebook de la marque ou sur Instagram !
  • Suivez le groupe Facebook Zero Waste San Francisco, co-animé par Stéphanie (en anglais)
  • Pour l’écouter, un podcast réalisé par Juliette Roy (en anglais également)
  • Un documentaire dont la bande-annonce suffit à prendre conscience de l’urgence d’agir : « Plastic China »

 


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#01. Itinéraire d’une écolo en herbe.
#02. Interview. Beth Terry, en croisade contre le plastique
#03. Un livre pour apprendre à se débarrasser du plastique.
#04. New York City, Plastic City