Ici, le silence s’éveille. Les sons frissonnent et dansent dans les airs comme un murmure continu. Craquements du bois, écoulement des ruisseaux, piaillements des oiseaux, mugissement du vent ou friselis des feuilles, la nature joue une symphonie sylvestre harmonieuse. Une mélodie ponctuée de frémissements, bruissements et autres tressaillements. Les séquoias centenaires s’expriment ainsi et chantent sur des partitions palpitantes. Comment ne pas être attentif à leurs chuchotements et à leurs bruits qui disent tous quelque chose ?

Ici, l’ombre jongle avec la lumière. Leurs ébats infinis créent des tableaux clairs-obscurs en perpétuels mouvements alors que les troncs immenses sortis des profondeurs s’étirent pour attraper le jour. Les rayons du soleil trouent parfois les feuillages de sillages incandescents mais lorsque les séquoias s’unissent en une cathédrale feuillue, seules de fines particules de lumière éclatées traversent l’épaisse voûte ombragée. Leurs immenses silhouettes brunes engouffrent alors les bosquets à leurs pieds. Parfois, la brume s’en mêle et enveloppe le paysage d’une cape blanchâtre mystérieuse. Comment ne pas être ébloui par ces jeux de cache-cache lumineux et ces ambiances aux reflets incessants ?

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Ici, la terre enivre. Elle exhale des senteurs d’humus, de mousse, de fleurs, de feuilles, d’humidité, de pierre, de pommes ou d’aiguilles de pin. Les odeurs boisées aux subtilités plurielles se succèdent, se mélangent, disparaissent puis réapparaissent au détour des sentiers et des saisons. Des parfums de lichen aux effluves de sève, en passant par l’essence d’écorce détrempée par les pluies, c’est un voyage olfactif puissant. Comment résister à ces arômes que l’on voudrait garder en soi le plus longtemps possible ?

Ici, l’énergie se respire. Elle se ressent, se palpe et s’apprivoise. Elle prend racine au plus profond du sol et vibre jusqu’aux cimes. La canopée discute avec les nuages quand plus bas, un tapis de mousse veloutée accueille l’étranger en territoire forestier. Traits d’union entre ciel et terre, ces arbres offrent une pause. Un instant en suspension, un entracte émotionnel ressourçant et un intime moment de bien-être. Toucher et enlacer ces vestiges parfois millénaires est une expérience qui résonne avec les sensibilités de chacun. Comment ne pas répondre à la vitalité de ces bois, comment ne pas vouloir étreindre leurs vibrations et garder l’empreinte de leur poésie à jamais ?

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Informations pratiques

– Le Monument National Muir Woods est un héritage des forêts de séquoias à feuilles d’if qui couvraient une bonne partie des vallées côtières du Nord de la Californie. Trésor écologique, le parc abrite une très riche réserve naturelle (animaux & plantes).

– Les séquoias sont âgés de plus d’une centaine d’année pour la plupart et jusqu’à 1000 ans pour certains. Le plus haut atteint près de 80 mètres. Et le plus large, mesure plus de 4 mètres de diamètre.

– Le parc est ouvert toute l’année de 8 heures du matin au coucher du soleil.

– Il se trouve à une vingtaine de kilomètres du Nord de San Francisco. L’accès se fait en voiture (autoroute Calif 1) mais le stationnement n’est pas aisé. Plus vous arriverez tôt, plus vous aurez l’opportunité de vous garer proche de l’entrée ! Les transports publics ne desservent pas le parc mais les taxis, VTC ou navettes privées le font.

– Le parc s’étale sur quelque 120 hectares et offre 10 km de chemins de randonnées pour la plupart balisés. Certains permettent  aussi de relier les pistes du parc fédéral du Mont Tamalpais voisin.

– Côté mercure, les températures oscillent entre 4°c et 20°c. Prenez donc des épaisseurs car si vous passez d’une clairière ensoleillée au lit de la rivière coulant entre les séquoias, le thermomètre descend… Notez que l’été s’accompagne d’un brouillard plus ou moins dense qui humidifie et refroidit l’atmosphère.

– Plus d’un million de touristes par an arpentent les sentiers de cette forêt ancienne alors si vous pouvez : évitez les week-ends et privilégiez les débuts de matinée ou les fins de journée. L’expérience n’est pas du tout la même en temps de foule…

– Quelques règles sur place : respectez la quiétude les lieux en observant le silence en de nombreux endroits, ne pas abîmer la nature, les animaux de compagnie ne sont pas autorisés, ni les pique-niques ou le camping.

– Séduite et charmée par Muir Woods (vous l’aurez saisi je pense!!), je laisse les mots de la fin à John Muir, l’écrivain et naturaliste engagé américain qui a donné son nom au parc. Il a déclaré à William Kent, l’homme d’affaire ayant acheté cette parcelle de terrain dans le but de protéger ces séquoias non abattus en 1905 :

« C’est le plus beau monument pour les amoureux des arbres que vous pouviez trouver dans toutes les forêts du monde ».